Ennio Morricone est décédé à l’âge de quatre vingt onze ans, après cinquante-neuf années d’une carrière prolifique. Le célèbre compositeur était aussi un chrétien affiché, grand admirateur du chant grégorien...
Il était un mythe de la musique contemporaine. Les succès d’Ennio Morricone ne se comptent pas. Il est celui qui a donné une sonorité au genre du western, en réalisant notamment les bandes sons de films tels que Le Bon, la brute et le truand, Il était une fois dans l’Ouest ou Et pour quelques dollars de plus. Ami d’enfance de Sergio Leone, ils ont révolutionné ensemble l’imaginaire du far west : récemment, c’était encore lui qui réalisait la musique des Huit Salopards de Quentin Tarantino.
« Il Maestro » ne s’est par ailleurs pas cantonné à l’univers des cow-boys. Parmi ses autres grands succès, citons l’hymne de Sacco et Vanzetti interprétée par Joan Baez, « Here’s to you ». Pour le cinéma italien, il aura travaillé avec des artistes aussi divers que Pier Paolo Pasolini, Vittorio De Sica ou Dario Argento. Pour le cinéma français, c’est lui qui aura réalisé la bande sonore du Clan des Siciliens et c’est encore lui que l’on retrouve derrière la musique de Karol, l’homme qui devint Pape, un film la vie de saint Jean Paul II sorti en 2005.
Un compositeur chrétien
S’il ne portait pas la foi en bandoulière, Ennio Morricone était un chrétien sincère. À la revue américaine National Catholic Register, il déclarait sans ambages en octobre 2013 être « un homme de foi ». À l’origine de cette foi simple et humble, il y a ces moments où, au temps de la Seconde Guerre mondiale, il priait le chapelet chaque jour, bercé par la voix maternelle récitant les Ave Maria. « Ma foi est née en famille », a-t-il déclaré à Credere lors d’un entretien le 5 juillet 2015.
À propos de son travail, il remarquait que « cette foi est probablement toujours là, mais c’est à d’autres de s’en rendre compte, aux musicologues et à ceux qui ne se contentent pas d’analyser les morceaux de musique, mais qui ont aussi une compréhension de ma nature, comme aussi du sacré et du mystique ».
Il était particulièrement admiratif du chant grégorien, « une tradition importante, vitale, de l’Église ». Ennio Moricone, qui déplorait que l’on « mélange les musiques profanes et les mots de l’Église », était particulièrement reconnaissant à Benoit XVI d’être sensible aux richesses de la tradition liturgique.
C’est toutefois pour son successeur, le pape François, qu’il a écrit une messe en 2015, la « Missa Papae Francisci », interprétée par l’orchestre symphonique de Rome. La première représentation de cette pièce tardive a lieu le 15 juin 2015. Le choix de la date n’était pas anodin : il s’agit de célébrer les 200 ans du rétablissement de l’ordre des Jésuites, et ce sont en tout 38 compositions musicales qui retentirent au Gesù, l’église mère des Jésuites à Rome.
À l’origine de ce lien fort avec les Jésuites, il y a l’histoire singulière d’une des plus grandes compositions d’Ennio Morricone, celle de la bande-son de Mission, de Roland Joffé, Palme d’Or 1986 dans laquelle il raconte l’évangélisation au XVIIIe siècle du peuple Guarani dans l’actuel Paraguay par des missionnaires Jésuites, ces derniers convertissant notamment grâce à leurs instruments de musique. Il parvient à harmoniser les divers thèmes musicaux magistralement, et ce « miracle technique » a été selon lui une « grande bénédiction ».
Il avait rencontré personnellement le pape François en novembre 2016 et dirigé, dans le cadre du jubilé des pauvres, un orchestre et un chœur pour un concert dédié aux personnes défavorisées. « Pour son extraordinaire engagement artistique, qui a aussi eu des aspects de nature religieuse », le pape François a d’ailleurs décidé de remettre au grand maestro la Médaille d’or du Pontificat, par le cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical pour la Culture, le 15 avril 2019. Dans un tweet datant du 6 juillet 2020, ce haut prélat a écrit : « Je le confie à Dieu pour l’accueillir dans l’harmonie céleste ».
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